Cela pourrait être possible grâce à un changement dans la méthode de calcul du diagnostic de performance énergétique (DPE).
La réforme du DPE : une solution pour les logements chauffés à l’électricité #
Bruno Le Maire, qui a récemment été chargé des questions énergétiques, veut modifier la méthode de calcul du DPE, qui classe les logements en fonction de leur consommation énergétique. Les logements les plus économes en énergie sont classés en catégorie A, tandis que les plus énergivores, appelés « passoires thermiques », sont classés en catégories F ou G et seront interdits à la location à partir du 1er janvier 2025.
Actuellement, un logement chauffé au gaz qui passe à l’électricité peut être classé comme passoire thermique en raison de cette méthodologie, même s’il réduit ses émissions de gaz à effet de serre par trois fois, selon le ministère. La méthode actuelle encourage donc à rester au chauffage au gaz.
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Des priorités différentes entre les membres du gouvernement #
C’est pourquoi Bruno Le Maire préconise une évolution du coefficient de conversion énergétique – un élément du DPE – afin qu’il favorise les logements chauffés à l’électricité plutôt qu’au gaz. « Si nous faisons évoluer le DPE sur ce point, des centaines de milliers de logements pourraient sortir du statut de passoire thermique », insiste le ministère, face à une crise aigüe du logement locatif.
« Il s’agit d’un souhait de Bruno Le Maire qui n’est pas encore acté et qui nécessite une arbitrage avec d’autres membres du gouvernement », souligne Bercy (Ministère de l’Économie et des Finances).
Une décision controversée #
Dimanche, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a annoncé une première évolution du DPE qui bénéficiera notamment aux petits logements. En corrigeant un biais spécifique de calcul pour les logements de moins de 40 mètres carrés (430 pieds carrés), le gouvernement prévoit de sortir 140 000 logements des catégories F et G.
« C’est une excellente orientation qui va permettre aux logements chauffés à l’électricité de sortir du statut de passoire thermique, d’autant plus que 92% de l’électricité est décarbonée », se réjouit Loïc Cantin, président de la Fédération Nationale de l’Immobilier, après l’expression du souhait de Bruno Le Maire.
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Cependant, Danyel Dubreuil, coordinateur pour l’efficacité énergétique chez CLER (association membre du Réseau Action Climat), dénonce : « ce qui est scandaleux, c’est de dire qu’en changeant le thermomètre on va résoudre le problème« . Selon lui, l’objectif de Bruno Le Maire n’est pas de rénover les logements et de réduire leur consommation énergétique, mais plutôt de réduire artificiellement le nombre de passoires thermiques car ce nombre pose un problème politique qui génère des obligations pour les propriétaires. Il estime que cette décision aggravera le risque de précarité énergétique.
« Sous la pression du lobby nucléaire, Bercy veut revoir les calculs pour les logements chauffés à l’électricité en matière de DPE, ce qui revient à s’écarter de la directive européenne qui parle d’énergie primaire et non d’énergie finale », ajoute-t-il, rappelant que si l’électricité émet moins de gaz à effet de serre, il faut produire 2,3 kilowatt-heures pour délivrer 1 kilowatt-heure d’électricité à son point d’utilisation – ce qui n’est pas le cas du gaz.
« C’est une concurrence sur qui peut le mieux détricoter la loi et Bruno Le Maire se positionne véritablement avec une volonté de l’affaiblir », regrette Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé Pierre, qui plaide pour une concertation.